A
ses débuts, vers 1880, l'Observatoire du Pic du Midi avait
une activité
météorologique
prépondérante. Les deux fondateurs de
l'observatoire, le général
de Nansouty et Célestin Vaussenat, ont rapidement compris
l'intérêt d'une
présence affirmée de l'astronomie au sommet.
Benjamin
Baillaud,
astronome et Directeur de l'Observatoire de Toulouse est
monté à de nombreuses
reprises au sommet du Pic du Midi. Lors de ces multiples
séjours, il observe la
qualité exceptionnelle qu'offre le sommet
pyrénéen et envisage d'y installer
des instruments d'astronomie sous une solide coupole de grand
diamètre. Par le
passé, quelques observations ratées à
cause d'une mauvaise météo et des
rapports mitigés sur la qualité du ciel du Pic du
Midi avaient été contredits
par d'autres observateurs qui s'enthousiasmaient pour le site. Tout
cela incite
Benjamin Baillaud à la prudence : il décide de
faire plusieurs séjours au
sommet pour évaluer méthodiquement le ciel avant
de se prononcer.
Benjamin
Baillaud
fait donc construire un abri provisoire en bois, recouvert par une
forme
d'entonnoir retourné. Les travaux débutent au
printemps 1901. Dès l'automne de
cette même année, Benjamin Baillaud et son
équipe entreprennent des
observations sous cet abri, qui accueille un télescope d'une
trentaine de
centimètres de diamètre flanqué de
deux lunettes. Ces observations vont se
poursuivre au cours des étés 1902, 1903 et, dans
une moindre mesure, en 1904.
Le constat est extrêmement positif et le Pic du Midi verra
bientôt des moyens
alloués pour installer une station astronomique au sommet.
En 1904 et 1905, des
bâtiments vont être construits à
proximité d'une nouvelle coupole de 8 mètres
de diamètre. Construite à Toulouse, cette coupole
est assemblée dans le jardin
de l'Observatoire où elle laissera son empreinte : une
petite maçonnerie
circulaire sur laquelle elle était posée est
encore visible aujourd'hui.
Une
montée épique
Les
éléments de la
coupole sont acheminées en train puis en voiture. Mais le
reste du trajet doit
s'effectuer avec des chariots tirés par des
mulets… Les premières pièces de la
coupole sont montées au Pic en septembre 1906. A cause du
mauvais, le reste des
éléments sera monté au sommet en
août 1907. Le 14 septembre, la coupole est
terminée ! Elle doit abriter un télescope de 500
mm surmonté d'une lunette
guide de 230 mm, mus par une monture équatoriale
à berceau.
Là
encore, monter l'instrument n'est pas une tâche
aisée. A la demande de Benjamin
Baillaud, le ministère de la Guerre lui attribue vingt-cinq
artilleurs et deux
lieutenants commandés par Charles Lallemand pour amener au
sommet la précieuse
cargaison. Pour l'occasion, le sentier est élargi. Mais
malgré les efforts du
14ème régiment
d'artillerie de Tarbes, l'instrument ne peut pas être
monté au cours de l'été 1906. En
août 1907, avec moitié moins d'hommes,
l'instrument arrive enfin au sommet. Le télescope Baillaud
sera véritablement
opérationnel en 1908 et connaîtra ses
premières observations avec les fils de
Benjamin Baillaud, Jules et René, dont le premier deviendra
Directeur de
l'Observatoire de 1937 à 1947. Peu d'observateurs
utiliseront le télescope et
la lunette guide. L'accès difficile, la rudesse de la vie au
sommet,
l'isolement et les conditions météo parfois
sévères rebutent les scientifiques.
Les quelques comptes rendus de cette époque montre pourtant
que le site offre
un ciel de grande qualité.
En 1930,
Bernard Lyot
monte au Pic pour mener à bien ses observations de la
couronne solaire avec le
coronographe qu'il vient d'inventer. Destiné à
créer artificiellement des
éclipses de Soleil, cet instrument nécessite une
transparence atmosphérique
exceptionnelle que l'on trouve au Pic. Sous le dôme d'acier,
Bernard Lyot
écrira une page historique de l'astronomie. A plusieurs
reprises, il utilisera
la lunette de 23 cm et s'apercevra que les images obtenues
étaient souvent
limitées par le pouvoir résolvant de l'objectif.
Sous
l'impulsion de
Jules Baillaud, une lunette de 60 cm de diamètre et de 18
mètres de longueur
focale prendra place définitivement sous la coupole en 1945.
Pour loger la
lunette, le faisceau optique est plié à deux
reprises par deux miroirs plans.
Appelé réfracto-réflecteur, cet
instrument permet aux observateurs d'obtenir
des images encore plus détaillées, qui permettent
de dessiner les planisphères
des satellites de Jupiter ! Dans les années 1970, la monture
du télescope
Baillaud cède sa place à une toute nouvelle table
équatoriale équipée d'une
batterie de coronographes.
La
fin brutale de l'activité scientifique de la coupole
Baillaud survient en 1997,
après la décision de restructurer l'Observatoire
du Pic du Midi en y aménageant
une zone ouverte aux touristes. La coupole Baillaud se trouve justement
au cœur
de ce nouvel espace
Aujourd'hui
immobile
et centenaire, la coupole Baillaud protége le coronographe
de Lyot et une
fidèle maquette de la table équatoriale. Les
traces d'une épopée scientifique
hors du commun.
Images
aimablement fournies par l''Observatoire Midi-Pyrénées